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La fin de l’homme rouge : une adaptation peu convaincante du requiem de Svetlana Alexievitch

  • Écrit par : Marie du Boucher

L'homme rougePar Marie du Boucher - Lagrandeparade.fr/ Quelle tentative, d’essayer de donner à entendre l’œuvre de Svetlana Alexievitch au théâtre ! L’auteure biélorusse, récompensée par le Nobel cette année, s’est attaquée à la fin de l’empire soviétique dans son dernier opus, "La fin de l’homme rouge". Elle demeure fidèle à sa méthode : aller interviewer des gens, et de ces entretiens, tirer des livres. Tout l’art consiste alors à transformer la parole orale en parole écrite. Svetlana Alexievitch expliquait notamment au Théâtre de l’Odéon lundi 2 novembre 2015 que cinquante pages d’entretien aboutissaient parfois à seulement une demi-page dans ses écrits.

"La fin de l’homme rouge" vient clore le cycle entamé avec "La guerre n’a pas un visage de femme" (ouvrage retraçant le récit de femmes soldats de l’Armée rouge pendant la Seconde Guerre mondiale) : c’est une encyclopédie de l’homo sovieticus que l’auteure a l’ambition de faire. Dans "La fin de l’homme rouge", elle est allée à la rencontre de vieux staliniens et leur a demandé de lui raconter leurs souvenirs de jeunesse, et la manière dont ils ont vécu la fin de l’URSS. Le livre a pour sous-titre : le temps du désenchantement. C’est bien, en effet, l’histoire d’une désillusion qu’Alexievitch narre, pour ce peuple qui a troqué son empire contre du saucisson.

Stéphanie Loïk a décidé de se concentrer sur quelques-unes seulement des histoires de ce requiem – il aurait été impossible de les raconter toutes. Du coup, on perd un peu la dimension symphonique de l’ouvrage qui s’articule autour d’une quinzaine d’histoires centrales, conçues comme des piliers qui supportent les innombrables récits d’anciens dignitaires et d’anonymes ayant vécu sous le communisme. La metteur en scène a essayé de rendre le caractère polyphonique de l’œuvre par un chœur, qui reprend certaines des phrases énoncées par le personnage principal (qui alterne tour à tour). Le procédé est un peu scolaire, et les phrases choisies ne sont pas toujours les meilleures. Surtout, la monotonie de ton lasse et l'on finit par s’ennuyer, trois heures durant. Là où Alexievitch a bien compris que l’homme ne peut supporter qu’une certaine dose d’horreur (sinon il referme le livre), Stéphanie Loïk ne craint pas de nous assommer avec l’histoire choisie au premier acte : celle d’une mère confrontée au suicide de son fils. Pas de coup de cœur de notre côté donc pour cette interprétation de l’écrivain biélorusse.

La fin de l’homme rouge ou le temps du désenchantement
De Svetlana Alexievitch
Mise en scène de Stéphanie Loïk
Avec Najda Bourgeois, Heidi-Eva Clavier , Lucile Chevalier, Vera Ermakova, Marie - Caroline Le Garec, Adrien Guitton, Martin Karmann et Jérémy Petit
 
Du 4 novembre au 7 décembre 2015 au Théâtre de L’Atalante
les lundis , mercredis, vendredis à 20h30
les jeudis et samedis à 19h les dimanches à 17h

(10, place Charles Dullin 78018 Paris / métro  Anvers, Pigalle, Abbesses )


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