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L’Amante anglaise : un crime commis dans l’art de la folie

L'amante anglaisePar Philippe Delhumeau - Lagrandeparade.fr/ « Ma route est allée droit vers ce crime », dira Claire Lannes, Judith Magre, à L’Interrogateur, Jean-Claude Leguay. Une intrigue policière troublante comme l’est le personnage de Marguerite Duras que rien ne laissait croire à commettre un acte monstrueux. Pierre Lannes, le mari joué par Jacques Frantz, semble dépassé par le tragique de situation dans lequel il est tour à tour témoin face aux aveux de son épouse et victime dans la confrontation avec L’Interrogateur.

L’Amante anglaise, un thriller psychologique inspiré d’un fait divers authentique romancé par Marguerite Duras qui, forte de son expérience d’auteure, utilise les mots qui cinglent la vérité, tranchent la raison en folie, dénudent l’intimité d’une vie de couple somme toute ordinaire pour livrer une histoire profonde sur la culpabilité.
Claire et Pierre Lannes mariés depuis plusieurs années mènent une vie de couple sans enfant dans leur maison avec jardin. Pour les aider dans les tâches ménagères, la cousine de Pierre, sourde et muette, partage leur quotidien. Claire ressent un dégoût face à cette infirme qui a les apparences d’un ‘petit bœuf’. « Elle est grosse », répétera à maintes reprises Claire Lannes. Difficile lui devient-il de supporter ce fardeau qui pèse dans sa vie et dans sa maison, exprimera-t-elle de façon directe ou détournée. Une attention pour dédramatiser la nature de son geste. Claire occupe ses journées assise dans le jardin quand le temps s’y prête, ou dans sa chambre pour dépoussiérer les meubles et laver son linge. Un moyen de fuir le présent si le passé la rappelle soudainement…peut-être son premier amour. Puis un jour, prise d’un élan incontrôlé, elle tue la cousine, la découpe et jette les morceaux dans les trains de marchandises qui passent sous un viaduc, non loin de son domicile. Arrêtée après avoir avoué le meurtre, elle n’évoquera jamais la raison de son acte. Il est à se demander si raison il y a.
Thierry Harcourt réalise une mise en scène construite sur la question de la culpabilité souvent portée dans l’interrogation, reconnue dans les réponses, mais à aucun moment expliquée. L’Interrogateur use de patience et de tolérance dans son approche avec Claire Lannes. Au terme d’un entretien haletant et éprouvant, Claire Lannes parait soulagée de s’être débarrassée de sa cousine et d’avoir évoqué sa culpabilité. Les zones d’ombre subsistent dans la compréhension des faits. Judith Magre et Jean-Claude Leguay sont concentrés dans un cercle de lumière qui s’adapte à l’intensité et à l’intimité de l’entretien. Judith Magre joue à la perfection le rôle de Claire Lannes, ne feint jamais ses émotions et ses regrets, présente un personnage sincère, voire lucide, bien qu’habité par la déraison. Jean-Claude Leguay interprète avec habilité et pugnacité L’Interrogateur. Jacques Frantz incarne le mari de Claire Lannes avec le détachement d’un homme qui a perdu ses repères face à ce drame. L’intention scénique de Thierry Harcourt insuffle à l’écriture de Marguerite Duras une profondeur psychologique canalisée par la remise en question de Claire et de Pierre. L’Interrogateur tente de trouver la bonne question qui a conduite Claire Lannes à commettre l’irréparable.
L’Amante anglaise, le roman de Marguerite Duras est sublimé par la mise en scène de Thierry Harcourt et par l’intégrité du jeu de Judith Magre, Jean-Claude Leguay et Jacques Frantz.

L'amante anglaise de Marguerite Duras
MISE EN SCÈNE : THIERRY HARCOURT
AVEC JUDITH MAGRE (CLAIRE LANNES) JACQUES FRANTZ (PIERRE LANNES) JEAN-CLAUDE LEGUAY (L’INTERROGATEUR)
ASSISTANT MISE EN SCÈNE : THOMAS POITEVIN  - LUMIÈRES : JACQUES ROUVEYROLLIS, ASSISTÉ DE JESSICA DUCLOS  - COSTUMES : VICTORIA VIGNAUX
PRODUCTION : ID PRODUCTION ET LE THÉÂTRE DANS LE PRÉ – CIE JFTZ CORÉALISATION : THÉÂTRE LUCERNAIRE, LIEU PARTENAIRE DE LA SAISON ÉGALITÉ 3 INITIÉE PAR HF ÎLE-DE-FRANCE - PARTENARIAT : THEATREONLINE
SOUTIENS : THÉÂTRE DU CHIEN QUI FUME (AVIGNON), ADAMI


- DU 25 JANVIER AU 9 AVRIL 2017 DU MARDI AU SAMEDI À 19H ET LE DIMANCHE À 15H à Le Lucernaire 53, rue Notre-Dame-des-Champs 75006 Paris
En Métro : ligne 12 (Notre-Dame-des-Champs), ligne 4 (Vavin ou Saint-Placide) et ligne 6 (Edgar Quinet)

- Du 7 au 30 juillet 2017 au Théâtre du Chien qui Fume - 15h45 - Festival Avignon Off

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