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Les folles : une mise en scène pudique et poétique sur un épisode obscur de l'histoire argentine

Les follesPar Imane Akalay – Lagrandeparade.fr/ Cette création théâtrale sans paroles rend hommage aux mères argentines qui, depuis quarante ans, font acte de résistance à Buenos Aires pour réclamer le retour de leurs enfants disparus sous la dictature de 1976-1983. La pièce est un triptyque dont les premier et dernier volets présentent une série de tableaux joués sur scène, tandis que s’intercale pendant l’entracte un court-métrage de 13 minutes, projeté dans une salle annexe, mettant en action des brodeuses et des marionnettes.

Dans le premier volet, une femme brode, écoute ce que l’on imagine être le discours fleuve d’un dictateur, caresse son ventre de femme enceinte puis berce son bébé, se remémore les absents, attend, vit - sur fond de radio, de sirènes de police ou de freins qui crissent, de milonga. Elle est mère courage, mère patience, mère résilience. Elle est toutes les femmes qui portent le foulard blanc – le foulard blanc qui représente les langes de leur bébé -- symbole de la résistance des mères des trente mille desaparecidos, hommes, femmes et enfants enlevés et disparus pendant les années de répression. Elle est impavide mais le fond sonore très travaillé crée une atmosphère anxiogène palpable dans la salle.

Le deuxième volet, filmé, met en scène des brodeuses, ou plutôt leurs profils floutés et leurs gestes mécaniques, sans émotions, alors que s’immiscent entre les mains travailleuses des figurines de chiffon, vieilles femmes couvertes de foulards blancs.

Le troisième volet présente un homme argentin immigré à Paris, qui explore des archives et cherche à mettre à jour les événements de l’époque, à créer l’émotion. Voire la culpabilité. Impunité des dirigeants, complaisance de l’église... les accusations et les constats sont posés.

Fil conducteur de la pièce à travers ses trois volets, les protagonistes humains sont muets et impassibles, leurs gestes mécaniques, la tension s’exprimant par le biais des effets de scène dont certains relèvent de véritables prouesses techniques – un visage humain qui se transforme en photographie, une figure géante symbolisant la mort – et de la création sonore qui laisse imaginer le contexte. Paradoxalement et de manière poignante, c’est dans les visages filmés en gros plan et les postures des marionnettes de chiffon, dans les traits des disparus esquissés au point de croix des broderies sur tambour, mis en exergue notamment dans le court-métrage du deuxième volet, que s’exprime le pathos. La mise en scène est pudique et poétique, la présence forte des marionnettes de chiffon émeut. Une pièce touchante qui s’adresse, à notre avis, davantage à un public adulte.

Les folles
Compagnie La Mue/tte
Conception et interprétation : Delphine Bardot et Santiago Moreno

Regard extérieur : Nicole Mossoux

Regard extérieur pour Point de Croix : Amélie Patard

Regard extérieur pour Silencio es salud : Jacopo Faravelli et Benoît Dattez

Musique et dispositif sonore : Santiago Moreno

Costumes et regard scénographique : Daniel Trento

Lumière : Phil Colin

Dates et lieux des représentations : 
- Du 17 au 28 octobre 2017 à Le Mouffetard (73 rue Mouffetard, 75005 Paris)

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